« Monter Peer Gynt à présent, c’est parler d’aujourd’hui » David Bobée

dans
la programmation

Après le succès de son Lucrèce Borgia, David Bobée continue ses recherches d’un théâtre original, transdisciplinaire, avec un collectif d’acteurs riche de sa diversité. 

« Monter Peer Gynt à présent, c’est parler d’aujourd’hui, c’est interroger notre monde bouleversé. C’est se lever contre une réalité brutale, sombre, silencieuse et convenue.
Tout le théâtre d’Ibsen est une école de questionnement et d’exigence.
Peer Gynt n’est ni un héros ni un anti héros. Il s’invente des vies fantasmées, des identités multiples, des fables. Il rêve de hauteurs, de reconnaissance, de grandeur, de pouvoir.
Il ne lutte pas pour de grandes idées mais contre toute contrainte, et dans la quête éperdue de ses rêves et de leur ivresse.

La pièce d’Ibsen s’étend sur une cinquantaine d’années, entre adolescence et vieillesse. Cinquante ans à courir les quatre coins du monde, pour répondre à cette question fondamentale de la quête de soi.
Hâbleur, vaurien, menteur, égoïste, sans foi ni loi, Peer Gynt fuit son village, sa mère, sa vie de paysan, ses responsabilités, son amour, ses femmes, décidé à essayer toutes les solutions pour trouver ce « soi » qu’il veut être, décidé à ne réaliser que de « grandes choses ».
Peer Gynt n’est pas un personnage de théâtre, il est le théâtre à lui tout seul, celui qui pose la question essentielle : qu’est-ce que « être au monde » ? Son inadaptation à ce monde qui l’entoure, son incapacité à agir sur lui, le poussent à chercher ailleurs à étendre sa quête.
Il part pour l’Orient des mirages et l’Afrique des déserts, tour à tour éminent sujet du roi des Trolls, marchand d’esclaves, empereur des fous, prophète, naufragé…
Au centre du récit, ce personnage aimante : il est de ces personnages qui concentrent l’attention, qui attirent autant qu’ils agacent ou déçoivent. Les autres personnages de la pièce, hormis Aase et Solveig, sont comme des satellites, attirés par ce qui les brûle, fascinés. Il n’est pas seulement celui qui ment, qui trahit, qui fuit ; il est aussi celui qui cherche et qui ne se satisfait pas de la réalité telle qu’on la lui propose.

La scénographie sera constituée d’une structure modulable d’échafaudages qui sera manipulée à vue par les acteurs, à la fois montagnes, forêts, navire et équipage, hauteurs aspirées et métaphore de la structure humaine, déconstruite et manipulable. Tous les personnages, tous les acteurs seront continuellement présents sur le plateau, comme les régisseurs de cette épopée, comme les manipulateurs de ces figures qui rencontrent et accompagnent le voyage de Peer Gynt.

Cette pièce me semble un magnifique espace de recherche, de créativité des auteurs transdisciplinaires du spectacle. J’aime à poursuivre ainsi ma démarche et mon engagement pour un théâtre contemporain, transdisciplinaire, interculturel et populaire avec les grands textes du répertoire : rassembler un collectif d’acteurs représentatif de la population française, dans sa diversité, dans la beauté de ses corps et de ses accents qui au service de ces textes en ouvrent d’autres sens et les font resurgir.
Je continue avec ce texte immense le travail initié avec Hamlet, Ovide, Lucrèce Borgia… interroger avec les acteurs de notre époque les grandes figures mythiques de notre patrimoine. »

note d’intention originale
de David Bobée, metteur en scène

Crédit photos :
Arnaud Bertereau / Agence MONA
décembre 2017